Le télétravail monte inexorablement en puissance pour de nombreux facteurs : facilité grâce aux moyens technologiques actuels, volonté de concilier vie privée et professionnelle globalement et problème de circulation dans des centres urbains saturés. Quel est l’impact sur le management ? Voici la partie positive mais sans occulter les défis posés par cette transformation durable.
Au même titre qu’on ne recrute plus de la même manière qu’avant, les modes de travail alternatifs comprenant le télétravail ou le travail dans des tiers lieux (coworking, aussi bien en zone rurale qu’urbaine) se développent comme ça a rarement été le cas dans le monde occidental.
L’entreprise avec un management pyramidal issu du taylorisme résiste encore mais face à l’arrivée d’internet, réparti désormais dans la moindre entreprise, jusqu’aux artisans ou indépendants – parmi les plus connectés – et une demande toujours plus forte de pouvoir concilier vie privée et vie professionnelle, la montée en puissance du management à distance a explosé ces dernières années.
La plupart des entreprises s’adaptent en donnant à leur flotte de cadres, de commerciaux tout le matériel nécessaire pour faire en sorte que ces salariés nomades connectés en quasi-permanence puissent être productifs comme sur leur lieu habituel de travail. Voire plus car ces derniers, parmi les salariés sédentaires n’ont pas à ajouter des temps de transport interminables et parfois aléatoires qui impactent fortement l’énergie, génèrent de la fatigue, sapent la bonne humeur du salarié en question.
Eviter les temps de transports en commun épuisants
En île de France, c’est un véritable problème qui dépasse le cadre RH : le rythme de travail avec des journées infernales – sans compter les gréves subies de manière récurrente – impacte considérablement les résidents en banlieue (petite, moyenne et grande), salariés comme cadres. C’est pourquoi le management de ces salariés particulièrement nombreux (la région IDF compte 12 millions d’habitants pour environ la moitié d’actifs, sans oublier les étudiants, apprentis qui empruntent ces transports) s’est progressivement imposé aux ressources humaines.
Phénomène nouveau mais qui ne devrait pas se résorber : la montée en puissance des aspirations à plus de souplesse et d’indépendance des générations Y, les fameux nouveaux entrants dans le monde du travail sont particulièrement demandeurs de ce type de mode de travail et à priori adaptés aux nouveaux outils et réseaux digitaux leur permettant de travailler à distance.
Mais ce n’est pas si simple car les managers eux-mêmes doivent s’adapter en quasi-temps réel à ces nouveaux outils, tout comme à ces nouveaux défis de management à distance, public par public, selon leur autonomie, leur âge, leur niveau dans la société.
Petit panorama des outils permettant de faciliter le travail à distance
D’après le journal MyRHline et son article du 22 janvier 2018 « Manager à distance : les bonnes pratiques », un sondage OpinionWay auprès de 892 salariés effectué en 2014, « 85% des salariés et 66% des DRH affirmaient que le télétravail était une opportunité pour faire évoluer l’organisation du travail. 90% des DRH estimaient impératifs de modifier le mode de management pour mettre en place le travail à distance. Voici quelques étapes retenues : il faut organiser son rôle de manager à distance. Cela passe par une rigueur dans le traitement des informations mais aussi une vigilance particulière sur le plan relationnel. Il faut être attentif aux informations reçues et délivrées ». Parmi les conseils suggérés, on retiendra notamment qu’il « faut laisser le temps nécessaire aux ajustements. Manager à distance implique la mise en place d’une organisation très différente que ce que le manager et les salariés ont pu connaître. Il faut veiller à se rencontrer ponctuellement mais régulièrement. Ces temps privilégiés peuvent se trouver autour d’un petit déjeuner par exemple. Ces rencontres sont indispensables pour préserver le lien avec les équipes ».
Mais attention pour le manager à ne pas se laisser envahir par rapport à d’autres salariés présents sur le site qui vous sollicitent également. Au même titre que pour les salariés physiques, il convient de « ne pas se laisser déborder. Il est utile de laisser des plages horaires pendant que le manager est joignable ». Sans quoi ce sera la vie du manager qui va vite devenir un enfer mélangeant sans cesse les périodes de temps privé sur celles consacrées au professionnel.
Côté outils à utiliser, afin de garder un contact à distance, « il est préférable d’utiliser des outils tels le téléphone ou la messagerie électronique. En revanche, quand il est question de collaborer à plusieurs sur un travail donné, il est conseillé de recourir à des outils de communication d’équipe tel que Slack ou des applications comme Sharepoint qui permettent de stocker, de partager des informations ». Visioconférence et conférence téléphonique seront recommandés dans la limite où le nombre de participants ne dépasse pas un certain chiffre afin de garantir l’efficacité des échanges.
Des limites qui sont perçues par le manager
Même si les lois Macron ont très récemment amendé le télétravail en obligeant un employeur qui refuserait à un de ses salariés d’y avoir recours à justifier son refus (confidentialité, présence d’assistance nécessaire au bon déroulement de la société voire de la direction…), il est clair que sa pratique pose certains problèmes identifiés par les managers.
Dans un article du site en ligne The Conversation de janvier 2018, intitulé « Bénéfices et limites du travail à distance », l’auteur apporte quelques bémols à cet enthousiasme qui gagne des millions de salariés, ravis de l’aubaine de ne plus avoir à supporter le bruit et l’hyper-proximité de certains open spaces. Comme par exemple, « le risque d’implosion du collectif de travail : c’est un argument avancé par de nombreux employeurs et managers car c’est un vrai risque. D’ailleurs, certaines entreprises pionnières comme IBM, Yahoo ou Hewlett-Packard qui sont allés très loin dans la mise en place du télétravail sont revenues en arrière. Pour comprendre, prenons un peu de recul historique. Il y a 150 ans, à Lyon, sur la colline de la Croix-Rousse, près de 80 000 canuts travaillaient déjà depuis leur domicile. Puis la révolution industrielle a déplacé les outils de travail dans les manufactures, puis dans les bureaux. Le droit et les codes culturels du travail que nous connaissons se sont ainsi constitués. Mais aujourd’hui, le numérique fait tout exploser en permettant de travailler où l’on veut et quand l’on veut. Il ne nous dit pas pour autant comment renouveler les collectifs de travail. »
Mutation irréversible vers plus de mobilité
Mais pour rester sur une note positive et moderne, on retiendra que le télétravail et le coworking qui étaient à leurs débuts – il y a quelques années seulement – le fait d’indépendants ou de freelances ou encore de start upers a vu arriver des salariés issus des entreprises classiques. Il n’est pas rare d’après l’article de The Conversation de voir des filiales de sociétés étrangères tester un pays en y implantant un correspondant au sein d’un espace de coworking, le temps de comprendre le marché, avant d’ouvrir un véritable bureau.
Pour finir par une note en phase avec l’évolution des attentes des salariés et leurs modes de vie déjà actuels, ce paragraphe de l’article de The Conversation illustre bien la tendance actuelle où le numérique a globalisé aussi les méthodes de travail et pas qu’en ligne : « Le coworking n’est déjà plus réservé à quelques centres spécialisés ici ou là. Il désigne désormais une façon de travailler qui facilite le travail collectif, l’innovation, l’entraide, le brassage, la mixité. Cela constitue une vraie réponse à l’explosion des collectifs de travail que le numérique opère dans les entreprises. À l’avenir, il est probable que de plus en plus d’actifs travailleront d’un lieu à un autre, alterneront leur présence entre leur domicile, le siège de l’entreprise, un centre de travail partagé ou encore les transports en commun qui sont aussi devenus de véritables espaces de travail. Il suffit de prendre le TER ou le TGV pour s’en rendre compte ».
Si malgré tous ces conseils vous vous sentez un peu dépassé(e) en temps que manager face à la demande de vos salariés – pas forcément les plus jeunes – et celle de votre direction souvent plus conservatrice, l’accompagnement par un coach expérimenté peut représenter une aide considérable dans cette transition qui s’annonce durable dans le monde du travail.
Sources :
- « Manager à distance : les bonnes pratiques » – MyRhLine – 2017 : https://www.myrhline.com/actualite-rh/manager-a-distance-bonnes-pratiques.html
- « Les limites du travail à distance » – The conversation – Janvier 2018 : https://theconversation.com/teletravail-et-nouvelles-formes-de-travail-opportunites-et-limites-88936
- « Management à distance : les huit leviers de la réussite » – Le Journal du Net – 2015 : https://www.journaldunet.com/management/expert/60085/management-a-distance—les-8-leviers-de-la-reussite.shtml