Le sujet monte en puissance depuis ces dernières années. Les fameux DRH ont revu leur fonction se modifier au profit de tâches de plus en plus liées à la numérisation, que ce soit pour une embauche ou la gestion des ressources humaines au quotidien. Tentative de projection pour comprendre jusqu’à quel point la fonction va être impactée par les changements digitaux.
La plupart des grands comptes travaillent sur la mutation de la gestion des ressources humaines dans les années à venir. En 2016, le groupe international Orange et Mercer, leader mondial du conseil en ressources humaines (20 500 collaborateurs dans 40 pays) ont sorti un livre blanc sur l’évolution de la fonction ressources humaines à l’horizon 2020-2025. Nous y sommes presque. En automne 2018, voyons quelles transformations importantes ont déjà impacté la fonction RH.
L’étude est suffisamment vaste pour être représentative puisqu’elle a été réalisée auprès de 25 DRH de groupes internationaux, de DRH et managers d’Orange, de responsables universitaires et d’enquêtes mondiales menées par Mercer sur 50 000 salariés.
A la lecture de cette étude, cinq principaux points ressortent :
« un nouvel équilibre des droits et devoirs dans l’entreprise : la génération des 20-35 ans constituera 50 % des effectifs au travail et 75 % en 2025…à l’aide du big data, les RH vont pouvoir mieux comprendre leurs attentes (rémunérations, congés, temps et durée de travail) et y répondre par une proposition de valeur personnalisée
un besoin d’adhésion à la raison d’être de l’entreprise : les RH vont de plus en plus jouer un rôle fédérateur autour d’un but commun pour renforcer la dimension collective, dans le contexte où les tâches opérationnelles courantes seront de plus en plus réalisées par le salarié lui-même ou par son manager à l’aide d’outils en ligne
le développement personnel plus que le poste, la carrière, l’entreprise : retenons que pour 65% des salariés de la génération Y, les opportunités de développement personnel sont le critère majeur dans le choix d’une entreprise
des organisations agiles, plates, ouvertes : l’agilité débouche sur l’aplatissement de la pyramide hiérarchique. Pour être agiles, les entreprises ne devront plus comporter que quatre niveaux hiérarchiques…les RH pourront tester de nouveaux modes de management comme l’entreprise libérée
évolution du mode de leadership du manager, pierre angulaire du changement : les RH auront pour mission de définir un modèle de leadership transformant et systémique afin que les nouveaux leaders de l’organisation soient identifiés de manière adéquate. »
Le cas Manpower, remis en question niveau RH
Dans un article du site EY (Ernst and Young- question de transformation), où est interviewé le PDG de ManpowerGroup France, Alain Roumilhac, intitulé « La volonté des collaborateurs est l’élément clé de la transformation » du 30 mars 2017 (2), la direction des ressources humaines est abordée dans plusieurs questions. A cette question : « Comment les directions des ressources humaines sont-elles impliquées dans la transformation des entreprises et la mise en place d’organisations plus agiles ? », le PDG répond que « certains dirigeants ont compris il y a 3 ou 4 ans, que les évolutions en cours auraient un impact majeur sur leur organisations et les compétences nécessaires…Ils ont déjà investi massivement dans des programmes de transformation…la fonction RH est soumise à une pression énorme car il faut être capable d’avancer dans une nouvelle voie qui ne correspond pas forcément à la culture de l’entreprise, d’apprendre au collaborateurs à changer de métier, leur donner plus d’autonomie, réduire les niveaux hiérarchiques, favoriser l’innovation… »
A la question stratégique : « comment le métier du recrutement évolue-t-il sous l’impulsion des nouvelles technologies ? », Alain Roumilhac, PDG de Manpower France répond : « Comme beaucoup d’autres secteurs du service, nous avons redimensionné notre réseau. Le nombre d’agences Manpower a été divisée par eux et beaucoup d’agences en centre-ville ont été transférées en périphérie car nous travaillons de plus en plus via le numérique. La question n’est plus d’avoir un emplacement de choix pour nos agences mais de savoir comment on attire le plus de monde sur notre site et comment on anime des communautés. Pour les fidéliser, nous avons mis en place des « CDI intérimaires » pour 4000 personnes. Nous leur proposons de bâtir des parcours et nous proposons des formations pour faire correspondre leurs compétences aux besoins du marché. »
Quand on lui parle d’ubérisation de l’intérim, le PDG de Manpower se veut rassurant : « nous serons peut-être ubérisés par des concurrents et de nouveaux entrants ou par nous-mêmes ! Chez Manpower, nous réfléchissons à proposer des solutions numériques. Pour limiter les risques, nous devons avoir une bonne connaissance de ce que l’on sait faire et de ce que l’on ne sait pas encore faire, et aussi savoir où se trouve la valeur que les clients sont prêts à payer . »
La fonction Ressources Humaines forcément impactée par l’ubérisation
On l’a vu : l’ubérisation qui touche également la fonction des ressources humaines propose également des avancées positives, dans le sens où les employeurs vont devoir de plus en plus tenir compte des attentes différentes des nouveaux salariés, avec la mise en place d’un management moins hiérarchique et faisant plus appel au collaboratif. La notion de e-réputation de l’employeur intervient également de fait avec l’usage accéléré du web et des réseaux sociaux.
Un passage d’un article de Focus RH du 9 Novembre 2017 permet de démontrer l’impact du digital sur les RH . Un ouvrage co-écrit par un professeur d’économie Gilbert Cette et un avocat Jacques Barthélémy, « Travailler au XXIème siècle. L’ubérisation de l’économie ? » analyse l’impact de l’évolution numérique sur le droit du travail et plus largement sur notre société : à la question « Quel avenir pour la fonction RH ? », les auteurs répondent « Si l’on considère que la fonction RH est liée à la gestion et la promotion du patrimoine humain, élément du patrimoine immatériel de l’entreprise, son rôle sera accru du fait de la diversité des situations de droit. Dans cette perspective, il est essentiel de cultiver l’approche organisationnelle du droit social pour en faire un instrument d’adaptation des normes au contexte dans lequel elles sont invitées à prospérer mais aussi de gestion préventive des risques….Plus il y a aura d’autonomie dans la construction d’un cadre juridique adapté, plus le DRH devra être créatif. Sans inventivité, la fonction RH risque de perdre sa substance car les normes d’essence légale vont diminuer au profit de celle d’essence contractuelle. Compte tenu des techniques du numérique, l’organisation du travail va changer, les contrats de travail également, ainsi que l’opposition entre salarié et indépendant. Cela oblige à prendre en considération les rapports entre donneur d’ordre et travailleur (surtout si celui-ci est dépendant économiquement), et pas seulement entre employeur et salarié. Tout le travail du DRH consistera à favoriser l’épanouissement des droits fondamentaux humains (dignité, justice, égalité…), dont les libertés individuelles, et en faisant un instrument de l’efficacité économique et en donnant du sens au concept de patrimoine humain de l’entreprise…La pire position pour un DRH serait de se contenter de gérer administrativement les contraintes juridiques, légales et conventionnelles sans créer de valeur ajoutée ! »
On l’a vu à travers ces témoignages de décideurs en première ligne de la transformation : l’impact de la digitalisation voire de l’ubérisation d’une partie des fonctions classiques de la fonction RH va demander encore beaucoup d’efforts d’adaptation aux professionnels dont les DRH. Si vous souhaitez être accompagné dans cette démarche par un coach superviseur formateur comme Evrard Beauroy-Eustache, n’hésitez pas à nous contacter pour une étude personnalisée de vos besoins en transition.
Sources :
- Quel rôle pour la fonction Ressources humaines en 2020-2025 ? – Rapport Orange-Mercer 2020-2025 : https://www.myrhline.com/actualite-rh/quel-role-pour-la-fonction-ressources-humaines-en-2020-2025.html
- EY – Questions de transformation : article « La volonté des collaborateurs est l’élément clé de la transformation » – 2017 : https://questionsdetransformation.ey.com/partis-pris/-la-volonte-des-collaborateurs-est-l-element-cle-de-la-transformation-_a-1-89.html
- Article Emploi et rémunération des RH : l’ubérisation est en train de définir la fonction RH : https://www.focusrh.com/carriere-rh/emploi-et-remuneration-des-rh/l-uberisation-est-en-train-de-redefinir-la-fonction-rh-29490.html