Sujet RSE (responsabilité sociale des entreprises) ou nouveau type de management adapté aux start-ups, le management autonome se diffuse progressivement dans certaines sociétés innovantes. Est-il compatible avec des PME ou des grands comptes ?
Management autonome, entreprise libérée, holacratie ? Tous ces termes vous disent vaguement quelque chose mais qu’en est-il vraiment dans le quotidien des PME, PMI et des grands comptes français en terme de management ? Tout d’abord, il faut définir ce qu’on entend par holacratie. D’après Wikipedia, c ‘est un système d’organisation de la gouvernance, fondé sur la mise en œuvre formalisée de l’intelligence collective. Opérationnellement, elle permet de disséminer les mécanismes de prise de décision au travers d’une organisation d’équipe auto-organisées.
On retrouve une analyse de l’holacratie dans un article d’avril 2017 de Muriel Touaty de Technion France intitulé : Holacratie : la Révolution du management d’entreprise : « l’holacratie se définit par le fait que l’autorité et les prises de décisions appartiennent aux salariés et à des équipes auto-managées. Il n’y a plus de chef, chacun est autonome et choisit ses missions tout en respectant l’alignement stratégique de l’entreprise. Les employés adhèrent à une vision commune des valeurs qui fédèrent l’équipe. »
Alors que le modèle classique de management s’appuie sur la verticalité (PDG->directeur->responsable->chef->ouvrier), le management libéré « est un système basé sur la confiance et la communication. Le manager doit par conséquent ne pas mettre de pression excessive sur ces collaborateurs afin de ne pas générer d’angoisse. Car l’angoisse, cest l’abandon du pouvoir contre la maîtrise de soi, avec des valeurs de respect et de loyauté : respect de l’autre, loyauté pour mettre en situation le collaborateur pour qu’il se sente serein et qu’il devienne un acteur engagé et participatif donc plus productif », ajoute Muriel Touaty.
Avec la montée en puissance du phénomène de start-ups pour tester puis développer une idée et l’arrivée sur le marché du travail des générations Millenials (nés entre les années 80 et 2000), ce type de management trouve preneur chez celles et ceux qui n’aiment guère les contraintes et sont à la recherche de sens dans leur travail.
Applicable aux plus grosses structures ?
Certaines grandes entreprises comme Michelin, le leader mondial du pneumatique s’est inspiré de cette méthode, bien avant que cela devienne une tendance pour donner plus d’autonomie à ses ouvriers. Un article du magazine Liaisons sociales du 21/10/2015 : Comment Michelin « libère » ses cols bleus explique en détail comment peu à peu les échelons intermédiaires qui souvent freinaient à la productivité et à l’autonomie d’ouvriers hyper qualifiés ont été modifiés voire supprimés : « avec les responsables d’îlots, dans l’îlot 1 de l’atelier (dans l’usine Michelin du Puy-en-Velay (Haute-Loire) où on assemble les pneus avant de les cuire, fini les chefs d’équipe qui décident de tout ! Les agents eux-mêmes remplissent les tableaux de bord, gèrent les ruptures de stock, les petites pannes et les imprévus, définissent le plan de production et sollicitent les formations nécessaires…/… Au sein du groupe Michelin, la volonté de promouvoir de nouvelles façons de travailler ne date pas d’hier… Afin d’accompagner le personnel, nous avons créé des modules de formation différenciés pour les équipes de direction, de maîtrise et pour les agents, relate Dominique Tissier, ex-directeur formation du groupe, aujourd’hui expert auprès de l’association Progrès du management. »
Bien sûr, on imagine pas une usine de production de la capacité de Michelin fonctionner sans directeur, ni sans cadres. Mais selon certains sites de production très spécialisés, ce type d’autonomisation de cols bleus connaissant parfaitement leur métier sert à responsabiliser les salariés et leur permettent d’éviter de perdre du temps à référer de leurs décisions à un chef intermédiaire ou au service qualité qui pourraient les freiner dans leur production, voire ne pas cerner dans le détail leur choix, dans la mesure où ces derniers n’ont pas une connaissance aussi fine que ces ouvriers hyper-spécialisés travaillant sur des technologies pneumatiques de pointe.
Succès chez Michelin avec les MAPP
Pour Michelin, ce type de management autonome s’avère être un succès puisque « des expérimentations sont menées dans 37 îlots de production, répartis dans 18 usines, sans thème fixé, ni cadre précis. Depuis 2014, le groupe formalise une liste de 14 chantiers de progrès. La démarche est ensuite étendue à l’intégralité de la production dans six usines pilotes…et baptisée MAPP pour management autonome de la performance et du progrès. Chaque site choisit ses chantiers, avance à son rythme, sans calendrier. »
Le constat de réussite lié à la notion d’entreprise libérée est résumé par Dominique Tissier, ancien responsable de la formation chez Michelin : « plus que libérer l’entreprise, il s’agit bien de libérer les énergies pour permettre aux salariés de retrouver du contrôle sur leur activité et favoriser leur créativité. C’est un avantage concurrentiel. Au Puy-en-Velay, les résultats sont positifs : moins de non conformité, d’arrêts de production et de meilleurs résultats à l’enquête de satisfaction, sans oublier une gestion des congés payés, prise en main par les agents eux-mêmes. »
Avec les outils numériques, une progression possible
D’après un article paru dans les Echos du 12/01/2017, écrit par Denis Cristol, directeur de l’ingénierie, intitulé Des équipes autonomes aux entreprises libérées, on y confirme une tendance de fonds qui vient de loin : « après les formes d’Adhocratie relevées par Mintzberg (1982), particulièrement repérées pour les travailleurs du savoir, les modes de task force ou de management par projet, c’est l’association au lien entrepreneurial qui est visé. Tout se passe comme si les entreprises libérées essayaient d’explorer de nouveaux liens engageant toujours plus les collaborateurs dans des réalisations personnelles au travail. Ce type d’organisation est certainement permis par les nouveaux outils numériques et les tendances sociales allant vers plus de prise en considération de collaboration librement consentie. Il s’agit moins pour les directions qui se lancent de susciter de l’autonomie au travail que de répondre à des pratiques qui s’inventent au grè des situations. »
Cependant, en terme de ressources humaines et selon les secteurs et la capacité à effectuer un changement en interne, le management autonome est encore loin de devenir une norme. Si dans votre entreprise, vous éprouvez le besoin de vous faire accompagné pour franchir ses étapes toujours délicates selon la culture d’entreprise, contactez-nous pour une étude sur mesure.
Sources :
- Holocratie : la révolution du management d’entreprise : le blog de Muriel Touaty, Technion France : http://murieltouaty.canalblog.com/archives/2017/04/13/35166818.html
- Article-2015- Comment Michelin libère ses cols bleus : http://www.wk-rh.fr/actualites/detail/88778/comment-michelin-libere-ses-cols-bleus.html
- Article des Echos du 12/1/2017 : des équipes autonomes aux entreprises libérées : https://www.lesechos.fr/idees-debats/cercle/cercle-164824-des-equipes-autonomes-aux-entreprises-liberees-2056560.php#C4dKHFfYJB5rWIIy.99